Une société propice à la perversion
La société actuelle ne place pas la lutte contre les pervers narcissiques parmi ses priorités, alors même que leur influence peut être profondément néfaste. Par certains de ses mécanismes, elle peut involontairement favoriser leur ascension et permettre de prospérer.
Ainsi, la perversion narcissique ne peut être réduite à un problème marginal : elle s’inscrit dans une dynamique sociale plus large
Notre société prétend se fonder sur la morale, traduite en droit. Les lois modernes sont censées incarner un socle de valeurs communes, issues de principes moraux tels que la dignité humaine, la justice, ou encore la protection des plus vulnérables. Le droit, dans cette perspective, n’est pas un simple code technique, mais une traduction normative de ce que la société considère comme « bien » ou « mal ».
Cette imbrication est d’ailleurs reconnue dans plusieurs textes fondamentaux. L’article 6 du Code civil précise que « on ne peut déroger, par des conventions particulières, aux lois qui intéressent l’ordre public et les bonnes mœurs ». L’article 16 du même code affirme que « la loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie ». Le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 94-343/344 DC du 27 juillet 1994, a confirmé que le principe de sauvegarde de la dignité humaine contre toute forme d’asservissement ou de dégradation a valeur constitutionnelle.
Mais ces principes moraux, s’ils fondent en théorie notre législation, ne sont pas toujours défendus dans la pratique. Certaines formes de violence — notamment psychologiques — demeurent ignorées, non prises en charge ou insuffisamment reconnues. Le cas du pervers narcissique illustre particulièrement ce hiatus entre les valeurs affichées par la société et la réalité de la protection offerte aux citoyens.
La morale, la Loi, la société et le pervers
Le traitre et l'imposteur de la société
La position du pervers narcissique n’est pas celle d’un simple délinquant qui enfreindrait la loi par impulsion, erreur ou faiblesse. Ce qu’il accomplit est bien plus insidieux : il adopte les codes de la société, il feint d’adhérer aux normes morales, il peut même se présenter comme leur défenseur le plus zélé. Pourtant, dans ses intentions profondes, il en sabote activement l’esprit. Il ne transgresse pas la loi frontalement : il la détourne de l’intérieur.
C’est pourquoi il constitue non seulement un imposteur de la société, mais il en est le prédateur des plus faibles : Un véritable loup déguisé en brebis installé dans la bergerie ! Il s’intègre parfaitement dans le paysage civique, se fait passer pour un citoyen modèle — parfois même brillant, charismatique, admiré — tout en tissant dans l’ombre une toile de manipulation, d’humiliation et de destruction psychologique autour de ses victimes. Il exerce une violence invisible, mais profondément corrosive.
À ce titre, le pervers narcissique peut être considéré comme un parasite du tissu moral et comme un traître du pacte social : il vit de l’image de respectabilité que lui renvoie la société, tout en travaillant à en saper les fondements éthiques. Il prétend appartenir au groupe, mais agit avec des intentions diamétralement opposées à celles qui garantissent la confiance, la sécurité et la solidarité entre citoyens.
Un conducteur en état d’ivresse est sanctionné pour le simple risque qu’il représente. Un pervers narcissique, lui, agit dans l’ombre, souvent en toute impunité, alors même que ses actes font déjà ou feront de nombreuses victimes.
Les sciences cognitives et la psychiatrie permettent aujourd’hui de mieux détecter les comportements pervers — via la tomographie par émission de positrons, des profils de personnalité, ou des outils comme le B-scan 360. Pourtant, aucune politique publique n’a envisagé un dépistage ciblé, ni une reconnaissance juridique de cette forme de prédation relationnelle.
La raison est peut-être à chercher du côté du vertige institutionnel que provoquerait une telle reconnaissance : si l’on ouvrait réellement les yeux sur l’ampleur du phénomène, la justice serait-elle en mesure de le traiter ? Cela signifierait requalifier en agression ce qui, aujourd’hui, est perçu comme simple mésentente, mésentente conjugale, ou conflit professionnel.
Impunité de crime psychologique
Il existe une brigade des mineurs, une brigade des mœurs… pourquoi pas une brigade contre les pervers manipulateurs ? Dans certains cas, ce n’est pas une seule victime qui souffre, mais tout un environnement social (quartier, cercle professionnel, famille élargie).
Des associations de civils en Angleterre ont montré, avec des résultats parfois supérieurs à ceux des institutions officielles, qu’il est possible de s’organiser pour retrouver des agresseurs sexuels. Certes, ces initiatives doivent être rigoureusement encadrées pour éviter les dérives, mais elles prouvent une chose : la société ressent un manque, un vide juridique face à certaines formes de prédation.
L’idée d’une brigade anti-pervers narcissiques est pour l’instant davantage un signal d’alerte et un appel à l’innovation sociale qu’une solution immédiatement applicable. Elle met en lumière un vrai besoin de reconnaissance et de prise en charge des violences psychologiques, mais sa mise en œuvre exigerait des garanties éthiques, juridiques et professionnelles très strictes pour éviter les dérives.
Une brigade spécialisée anti-pervers?
Article 6 du Code civil – Légifrance
Droits des victimes – Service-public.fr


« Quand une communauté humaine sent s’agiter en elle une poussée de liberté [individuelle], cela peut répondre à un mouvement de révolte contre une injustice patente, devenir ainsi favorable à un nouveau progrès culturel et demeurer compatible avec lui. Mais cela peut être aussi l’effet de la persistance d’un reste de l’individualisme indompté et former alors la base de tendances hostiles à la civilisation. La poussée de liberté se dirige de ce fait contre certaines formes ou certaines exigences culturelles, ou bien même contre la civilisation. »
Sigmoud Freud


Malaise dans la civilisation
La société le terreau de la perversion narcissique
Christine Calonne « envisage comment la société patriarcale, dominée actuellement par l’économie, est le terreau de la perversion narcissique ».
Geneviève Schmit :
« Actuellement, dans ce monde ou le rendement et l’efficacité sont les priorités, l’altérité est devenue la valeur au monde la moins bien partagée.
Nos sociétés, fondées essentiellement sur la rentabilité économique, ne sont plus suffisamment bienveillantes. Le quotidien nous abreuve de tous les manquements aux devoirs, au respect les plus fondamentaux et nous mènent inexorablement vers un état de crise où l’insécurité se retrouve jusque dans le noyau familial.
Les crises financières à répétition et la précarité ont favorisé le « chacun pour soi ».
La conscience et l’amour de l’autre ne sont plus aujourd’hui considérés comme des valeurs nobles. »




Déshumanisation de la société
Christine Calonne : « De plus en plus c’est le paraître au détriment de l’être qui est vraiment mis en valeur et donc ce paraître passe par la compétition entre les gens, et cette compétition est de plus en plus dure. Et donc cette compétition amène à vouloir écraser l’autre pour pouvoir survivre.
Donc cette promotion de la compétition à tout prix, cette promotion de la performance à tout prix entraine évidement a finalement se couper de ses capacités d’empathie de ses capacité à aimer et donc de plus en plus on voit une tendance à la déshumanisation de notre société et la déshumanisation fait qu’on est plus reliés les uns aux autres ; l’égocentrisme devient vraiment la valeur dominante et la quête du pouvoir et de l’argent… et donc tout ça va dans le sens du développement de la perversion narcissique. » - (Extrait de vidéo youtube)

« On est en permanence, dans notre vie politique, rattrapé par les affaires comme on dit. Quelles qu’elles soient d’ailleurs, et quel que soit leur nom. Mais toutes ses affaires ne sont rien d’autre que le signe de la « perversisation » inouïe et extrême de notre système. Et ce qui fait que notre système est à ce point pervers, c’est très exactement cet écroulement, cet anéantissement, cet affadissement… et disons-le ; cette décadence. […]
Ce dont il est question c’est l’écroulement du social, du collectif, de la transcendance ; de l’idée que « moi je » passe après « nous ». Et tout ceci s’est opéré naturellement sous le fond d’écroulement de la société patriarcale. […] En même temps que la société patriarcale s’est écroulée, il y a eu une éclosion individuelle.
Chaque sujet voulant prendre une place en son nom, chaque parole ayant la même valeur que celle du copain ; Ce qui a donné lieu à ce que les psychanalystes ont appelés « une crise de la légitimité »»
La « perversisation » de la société

Un monde pervers
Boris Cyrulnik averti que consécutivement à une suite de publications de livres récentes aux Etat Unis (tel que « Alone in the crown » – Seul dans la foule ) « des neurologues très au courant de la neurologie, analysent que nous entrons dans un monde narcissique – c’est-à-dire un monde pervers qui « fait souffrir les autres au nom de "Ma jouissance" »
